Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Voyage au Vietnam du Nord
27 avril 2014

Une poule exprès

Hoï An, 14 janvier (souvenir, photos, et cahier rouge pour les chanteurs)

L’histoire annoncée de la poule. Le 14 janvier nous avions mangé à quelques kilomètres de Hoï An dans un quartier de maraîchage, où une des familles a organisé un restaurant cours de cuisine, bien reçu par les agences de tourisme, et plutôt sympa : on apprend en dix gestes comment faire un rouleau, les cubes de porc rapidement frits dans une petite poêle, la pâte à crêpe qui les enrobe, d’une poigne précise faire sauter-retourner, garnir généreusement de germes de soja, rouler, c’est prêt à être mangé, chaud, frais et craquant. En milieu d’après-midi nous avons poursuivi en vélo, visité une pagode où des moinillons se formaient au jardinage si soigné qui fait partie de l’espace et l’esprit d’un tel lieu — dans une galerie à plafond de grillage, des centaines d’orchidées de toutes couleurs poussaient sur des morceaux de bois, suspendues à mi-hauteur.

Hoï An étant très touristique, Jean-Marie avait demandé à Huy notre guide de nous indiquer un endroit où manger qui ne le serait pas. À l’approche de la ville, Huy nous a fait passer par des venelles, et nous a indiqué une maison, précédée d’un auvent-hangar : elle fait restaurant.

Le soir venu, nous avons retrouvé la venelle, l’auvent-hangar précédant la maison. En bordure de la rue il servait de garage à motos, mais au fond il était éclairé, dix tables étaient disposées, dont trois occupées. Nous avons rempli la quatrième, bien au milieu, sous les regards de tous : nous avons compris que nous devions être à peu près les premiers Européens à venir partager leurs repas.

Une jeune femme qui faisait marcher l’affaire nous a apporté un menu : écrit entièrement en vietnamien, sans illustration. Jean-Marie sonorise bien la langue de sa petite enfance, mais ne la comprend plus du tout. Et les trois autres encore moins. Quant à la jeune femme, elle ne comprenait qu’un seul mot d’américain relatif à un repas : chicken. Nous avons commandé donc à l’aveuglette. Il y a eu un potage. Puis, comme le plat (inconnu) se faisait attendre, nous avons voulu confirmer que nous comptions sur lui, avons parlé de chicken puisqu’au moins ça était dans notre langage commun.

Les trois autres tables étaient occupées, l’une par la jeune femme et des familiers, la deuxième par trois hommes très imbibés, cinquante cannettes de bière vides jetées à leurs pieds, vociférant plus que parlant, qui sont bientôt partis. À la dernière étaient quatre hommes, qui n’avaient bu que le raisonnable, et qui chantaient, des chansons du Vietnam et d’ailleurs, avec de belles voix, lisant les paroles sur une feuille, l’un faisant les percussions avec ses baguettes. C’est ainsi qu’ils ont chanté Besame mucho (embrasse-moi beaucoup), le classique sud-américain. Marie, qui le fait chanter à ses choristes, était ravie. Nous avons hésité, mais nous n’avons pas su leur rendre la chanson. Dommage ?

Le plat que nous espérions est arrivé. J’ai oublié quoi, sinon que ce qui correspondait à du bœuf était des ligaments des pieds, frits, tout à fait mangeables au demeurant, mais qui nous faisait mesurer combien nous jetons dans un bœuf de nos tables repues ! Nous étions rassasiés et nous avons demandé à payer mais la jeune femme nous a fait comprendre que ce n’était pas fini, a entraîné Jean-Marie dans la cuisine où il a constaté qu’une poule était en train de cuire dans le bouillon, abattue pour nous tout exprès dans le poulailler mitoyen après notre demande de chicken.

Que faire d’autre ? Nous avons attendu la poule. Elle est arrivée enfin, sur un grand plat. La jeune femme nous l’a montrée. Puis l’a posée sur la table à côté, a mis des gants jetables, et en dix gestes énergiques l’a divisée en portions qu’elle a remises en scène sur le plat, composition bien symétrique, tête et bec dépassant d'une écharpe de cébettes, magnifique.

La chair de la poule n’avait guère eu le temps rassir : elle était dure, mais goûteuse. Nous en avons mangé assez pour faire honneur à nos hôtes. Nous leur en avons laissé assez pour qu’ils en fassent un autre plat : nous n’avions vraiment plus faim.

C’était l’heure de partir. Le patron — sans doute le père de la jeune femme — avait déjà éteint, dans la pièce d’accueil de la maison, les lumières de l’autel des ancêtres. Entrant en scène, il a pris le bloc des mains de sa fille, et solennellement a écrit la facture :
— Le poulet : 300 000 VND
— L’ensemble des autres plats : 170 000 VND
— Total : 470 000 VND, soit 4 euros par personne. Nous restions dans notre dépense moyenne… Nous les avons remerciés, bonne nuit, belle rencontre.

 

P1110072

P1110087

P1110106

P1110111

P1110114

Le quartier de maraîchage : lycéens s'initiant à l'enrichissement de la terre par enfouissement de végétaux.

P1110183

La pagode, ses jardins, ses jardiniers, ses orchidées.

P1110144

P1110158

P1110162

P1110184

Une poule aux cébettes.

Publicité
Publicité
Commentaires
Voyage au Vietnam du Nord
Publicité
Archives
Publicité